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Les préparatifs : les montagnes russes des choix à faire

Parfois j’envie très fortement l’ignorance. Car le savoir à un prix, celui du doute, des questions et angoisses. En tout cas pour moi. Car il faut faire des choix. Et je ne suis jamais sûr de moi. Donc tout choix est complexe. Psychologiquement c’est un vrai maelström qui se déchaîne. Et émotionnellement c’est les montagnes russes.

Prenons un problème simple : pour aller faire du camping et de la randonnée à pied et en vélo, il me faut un sac de couchage, le mien est au bout du rouleau et je voudrais gagner un peu en volume.

Si j’étais ignorant, j’irais dans une grande surface de sport genre Decathlon, et je prendrais le premier sac qui soit chaud, compact, et pas cher.

Mais comme je suis un éternel perfectionniste et incertain, rien ne se passe aussi simplement. Déjà car il n’existe jamais la solution parfaite à ma question. Dans cet exemple, les sacs de couchage chauds et compacts sont chers. Et les sacs chauds et peu chers sont énormes.

Alors je commence à regarder sur le web. Je compare. Je fait des tableaux. Je cherche le meilleur rapport qualité-prix. Je parcours les forums nuit et jour. Je discute sans relâche des intérêts de tel type de duvet de canard ou de telle garniture synthétique. Entretemps je tombe sur le principe de la randonnée ultra-légère et devient obsédé par le poids.

Puis je tombe sur une promo alléchante, je prend le moins cher et le plus chaud dans la promo : un sac d’alpinisme à 170 €, très chaud. Problème : pas compact du tout. Et est-ce que j’ai dit que 170 € c’est déjà très cher en fait ? OK c’est moins que d’autres à 300 ou 400 €. Mais c’est un prix tellement exhorbitant pour moi que je ne l’ai jamais sorti de chez moi au final. Sans compter qu’il est trop gros.

Donc je le revend. Retour à la case départ. Sans gagner 20.000 €. Et je passe à nouveau des semaines à explorer les gammes des fabricants, les offres, les soldes, les bons plans, pour trouver le meilleur truc.

Au bout d’un moment (quelques mois quand même), j’en ai marre, je regarde les petites annonces sur Leboncoin. J’achète direct un sac de couchage Decathlon d’occasion pour 50 €. C’est pas le plus compact, pas le plus chaud, pas le plus léger, mais suffisamment chaud, suffisamment compact et pas trop lourd. Et c’est exactement celui que j’aurais acheté si j’avais simplement été dans un magasin et pris le premier modèle qui entrait partiellement dans mes critères.

Tant de temps. Pour rien.

La société de consommation nous pousse à comparer sans cesse, à faire jouer la concurrence. Mais est-elle la seule coupable ? Ou alors suis-je aussi à blâmer pour mon indécision ? Et ne ferais-je pas volontairement traîner les choses ?

Et si en réalité Decathlon n’était pas simplement une application moderne de la société communiste qui face à un éventail de choix immense s’obstine à proposer un seul choix pour un seul besoin ?

Tant de questions. Dont on se fout pas mal au final.

C’est quoi l’important ? C’est qu’un sac de couchage soit en poly-pertex-duvet-100%-de-cuin-amérindien ? Qu’il ne pèse que 370 grammes sur la balance quitte à se peler les miches ?

Ou alors l’important ça serait peut-être simplement de sortir. Quelque soit le sac de couchage, sa composition, son poids, ou sa couleur.

Les anciens faisaient de l’escalade avec des coinceurs en bois, de l’alpinisme avec des cordes qui cassaient au moindre choc, de la randonnée avec des tentes en coton, et du vélo sans vitesses. Alors qu’est-ce qu’on s’emmerde ? N’importe quel choix moderne sera toujours mieux que tout ça.

L’important c’est de voyager quand on a envie de voyager, pas de comparer quand on a envie de voyager.